Marche de la CMAS et alliés : l’imam pas très net est de retour !

L’Etat du Mali, depuis trop longtemps, est mal gouverné, mal géré et depuis pas si longtemps n’offre que très peu de perspectives d’avenir réjouissantes. Nul ne peut raisonnablement dire quand la myriade de problèmes qui assaillent le pays trouvera un début de solution. La durée, l’ampleur et la persistance de ce mal être malien a fini par rendre les plus forts pessimistes et les autres fatalistes et résignés.

Chaque jour qui passe l’énergie vitale du peuple dans son entièreté est sapée davantage et le corps social semble avoir le jarret coupé. Les chances d’un sursaut collectif fondé sur une analyse rationnelle de la situation s’éloignent de l’horizon chaque jour davantage tant les acteurs politiques de tout bord, y compris ceux qui font la politique en prétendant le contraire, se sont spécialisés en voltes-faces, des discours contradictoires et des reniements les plus éhontés. Les Maliens sont confus, désorientés. De cette désorientation des mauvais génies sortis de boîtes idéologiques pourries veulent faire le bois qui brûlera le pays tout entier à l’image des pans de territoire qui sont sous la coupe de Kouffa, administrant ainsi au patient Mali un remède bien pire que le mal dont il souffre.

Cependant, à la différence de Kouffa, ils n’ont aucun moyen militaire à opposer à l’armée nationale et à une population qui a beaucoup moins subi l’oppression, l’injustice et la carence insigne des représentants locaux de l’Etat alliés à des notabilités locales qui ont toujours vécu de l’exploitation du labeur des autres.

Le terreau social sur lequel Kouffa a prospéré est absent à Bamako, alors après sa première tentative avortée de fomenter une insurrection populaire, la CMAS de Mahmoud Dicko, a révisé sa stratégie et s’est adjoint un ensemble hétéroclite d’acteurs aux motivations les plus variées dont l’unité ne tient que par leur volonté d’imposer un rapport de force à IBK.

À l’image du MNLA qui a constitué le faux nez des djihadistes, d’honnêtes personnalités déboussolées et surtout des politiciens qui pèsent peu dans l’arène politique nationale sont mis en avant par la CMAS pour servir ses projets funestes.

Parmi ces politiques, on retrouve les non partants, les battus d’avance, ceux qui ne pèsent rien dans l’arène politique nationale mais savent vociférer et qui ont décidé de ne pas participer aux élections législatives. On retrouve dans ce groupe tous les candidats au premier tour de la présidentielle de 2018 dont aucune liste aux législatives ne s’est réclamée (Moussa Sinko et consorts). Il y a aussi ceux qui ont subi une déculottée aux législatives et dont le parti politique est moribond, Choguel K. Maïga en est l’archétype.

Il fut un temps où les rugissements du tigre faisaient peur à ceux qui, ayant collaboré de bout en bout avec l’UDPM, ont tout renié à la vingt- cinquième heure et débarqué avec armes et bagages à l’ADEMA. Pendant dix ans, le MPR de Choguel a participé à la gestion du pouvoir avec ATT, consacrant ainsi le retour en grande pompe de l’ex-UDPM dans le champ politique malien.

La gestion politique de l’ADEMA avait été si calamiteuse que ce qui était impensable en 1991, la résurrection de l’UDPM même sous une autre forme, vit jour et avec légitimité. Aux côtés d’ATT, le MPR obtint 8 députés en 2007, son meilleur score historique, puis trois en 2013 après qu’il ait décidé de soutenir IBK au second tour de la présidentielle de 2018. Mais pour des raisons politico-financières, le MPR rompit avec IBK après trois ans de compagnonnage. Après les résultats peu flatteurs de 2018, ces législatives étaient un test de survie du parti et les résultats sont sans appel.

Le MPR est en réanimation dans un état dramatique : un seul député élu. Le parti ayant rempli sa mission historique, qui était de réhabiliter au moins en partie l’héritage de l’UDPM, tâche dans laquelle les «démocrates» l’ont beaucoup aidé par leur incurie et leur appétit jamais satisfait de la chose publique, et Choguel ayant commencé une carrière d’intellectuel engagé par la publication d’un livre d’histoire politique, il faut croire qu’il n’y a plus grand monde pour s’occuper du MPR.

Le groupe politique dont le MPR était l’expression est dans un âge très avancé pour la plupart. La nature politique du MPR lui barrait l’accès au renouvellement. Son odyssée s’achève, mais avant Choguel veut nous faire un Tièblen. Au premier appel d’IBK pour intégrer un gouvernement, Choguel abandonnera ses alliés de circonstance et droit dans ses babouches retournera en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire son grand boubou.

Lorsque courant février 2020, Mahmoud Dicko a réuni les membres de la CMAS pour leur exiger de surseoir à leur participation aux élections législatives au motif que la CMAS n’est suffisamment bien structurée encore, il fallait comprendre que Mahmoud Dicko s’est rendu compte qu’il n’aura pas le pouvoir par des voies électorales et que seul le chaos peut lui permettre de réaliser ses ambitions politico-religieuses. Cela a pour corollaire immédiat qu’il est prêt à brûler le Mali pour régner sur ses cendres.

La seule option viable pour Dicko est de créer une guerre civile religieuse. Les djihadistes ne peuvent s’épanouir que dans le chaos. Leur projet n’est compatible avec aucune forme d’organisation étatique ou économique moderne. C’est pour cela qu’Issa Kaou Djim prône le vide institutionnel absolu en appelant au départ du président, du gouvernement et à la dissolution de l’Assemblée nationale.

La question stratégique qui se pose à Dicko alors est comment créer ce chaos et s’imposer par la force. La réponse qu’il a trouvée se trouve en filigrane dans ses discours : faire alliance avec Kouffa et Iyad, et se baser sur les salafistes qui ont infesté le Mali depuis trop longtemps déjà : Mahi Ouattara de Sébénicoro et bien d’autres n’ont pas fait mystère de leur soutien plein et entier aux djihadistes et sont impatients d’avoir l’occasion d’ouvrir un autre front à Bamako.

Mais les salafistes et leurs cousins wahabites n’étant pas majoritaires, loin de là, il veut leurrer les masses en arborant un masque d’agneau sur le visage de loup du salafisme, en prétextant que son combat est contre les maux bien réels que sont la crise sécuritaire avec son cortège ininterrompu de morts civils et militaires quasi-quotidiens, la crise scolaire, la corruption et plus généralement la mauvaise gestion des affaires publiques, quel que soit le domaine ou le secteur au Mali. D’où la révision de sa stratégie après l’échec de sa première tentative en mettant en avant cette fois des personnalités politiques mais flanquées de Djim pour rassurer ses soutiens qu’il demeure au contrôle de l’opération.

Cependant, la désillusion des membres de la CMAS sera à la hauteur de leur méconnaissance du Mali. Il n’y a aucun chemin qui conduit l’idéologie de Dicko au pouvoir dans notre pays. Les autres obédiences musulmanes, largement majoritaire dans le pays, jusqu’au jour du jugement dernier, ne s’allieront à Kouffa et consorts.

Sur le plan strictement politique, l’Assemblée nationale vient d’être renouvelée à plus de 80% et ce ne sont pas les décisions détestables de la Cour constitutionnelle dans une minorité de circonscription qui viendront entacher sa légitimité. Les partis politiques de tout bord qui y sont représentés n’ont aucun intérêt à un départ précipité d’IBK et encore moins à l’avènement d’un pouvoir sous tutelle de Dicko et de ses amis salafistes.

En définitive, Dicko va peut-être réussir à créer des troubles, ou plutôt accélérer la propagation du coronavirus, dont nous n’avons vraiment pas besoin, mais rien qui modifie à court terme les rapports de forces militaires et politiques. Le président de la République devra être ferme pour une fois et donner instruction aux services compétents de l’interpeller pour sédition et atteinte à la sureté de l’Etat.

Lorsque ses soutiens les plus illuminés le verront sous les verrous, sans coup férir, ils sauront que l’hippopotame a encore des crocs et ne se gênera nullement pour les utiliser.

Abdoulaye Shaka Bagayogo/L’Oeil du Mali

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