Malikura : malgré le départ de Barhkane, le diable est là !

Le 15 Août 2022, le dernier soldat français a quitté le Mali pour le Niger. Une situation inédite qui a mis la France en colère. Elle a cherché tous les moyens pour nuire à la relation entre le Mali et la Russie, mais cela ne semble pas marché. Quant aux maliens, il faut dire la lutte est loin d’être terminée. Nous allons pour des décennies pendant lesquelles il va falloir chasser le diable de la tête du malien. Il y a encore ces maliens convaincus de leur incapacité à vivre sans les blancs, il faut les rebaptiser.
Beaucoup de nos compatriotes sont très faux. L’éducation est ratée au Mali, elle doit être corrigée. La déviation sociale a donné naissance à la déstabilisation des structures sociales qui doivent permettre d’asseoir les bases du développement du pays. L’on a fait croire avec les systèmes démocratiques que l’homme est libre et qu’il doit s’affirmer. Voilà aujourd’hui, les hommes politiques ont occupé la scène sociale et la gestion du pouvoir. Ils ont ainsi mis en place des clans pour se partager les richesses du pays. Nous vous proposons ce texte de Günther Anders, un extrait de son livre « L’Obsolescence de l’homme » publié en 1956, (Editions Ivréa). Il décrit comment étouffer la révolte d’un peuple.« Pour étouffer par avance toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Les méthodes du genre de celles d’Hitler sont dépassées. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes. L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées. Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif. Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser. On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté. Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur qu’il faudra entretenir sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur. L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels. »
Les maliens ont été conditionnés pendant des années à la corruption, au sexe malsain, à l’incivisme, entre autres. L’éducation malienne a été sabotée. Pour avoir une éducation de qualité, il faut s’inscrire dans quelques établissements privés en déboursant beaucoup d’argent. Les pauvres ont tort et eux aussi posent des actes qui les enfoncent davantage dans la pauvreté. Les gens préfèrent les divertissements plus que le sérieux. L’argent a été mystifié voire déifié. Des universités qui fabriquent des chômeurs. Il faut observer des actions de vantardise pendant les cérémonies de mariage, de baptême ou autre, aucune culture entrepreneuriale. Au lieu d’avoir un esprit critique, les gens ont des esprits de critique. Fournir des efforts est devenu gênant. Les gens sont tellement conditionnés qu’ils ont peur de quitter ce conditionnement-là. Ceux qui se réclament intellectuels ne pensent qu’à leur ventre, en tout cas beaucoup d’entre eux. Ils sont été aussi conditionnés à ne penser qu’au ventre. Les femmes sont devenues des « objets sexuels » pour servir les activités de publicité ou pour atteindre d’autres objectifs.
Par conséquent, il faut s’attendre à des frustrations d’année en année et c’est que les maliens ont vécu depuis la chute de Modibo Keita, en 1968 jusqu’en 2020, soit cinquante-deux (52) ans de décente aux enfers de façon progressive. Toutes les initiatives de développement ont été combattues et on continuait à vendre du rêve au peuple. Le président de la transition doit utiliser aussi ses fonds pour monter des projets allant dans ce sens. C’est cela le nerf du combat. Sans ressources humaines de qualité, aucun pays ne peut se développer. Il faut chasser le diable de la tête du malien.
Yacouba Dao/La Découverte